La traumatologie sportive est un domaine regroupant des pathologies souvent bien connues des professionnels avec des protocoles de rééducation bien définis. Cependant, certaines pathologies sont au centre des interrogations et soulèvent de nombreux questionnements quant à leurs rééducations : c’est le cas de la pubalgie, une pathologie fréquemment rencontrée dans le domaine du sport et qui présente un taux de récidive élevé. C’est une pathologie multi factorielle à origines multiples, et la réussite de sa prise en charge nécessite une identification précise de l’étiologie. Le bilan permet ainsi d’orienter le traitement à effectuer.
Après quelques mois de pause, nous retrouvons pour ce nouveau numéro de notre rubrique LA MINUTE DU SPECIALISTE, notre kiné spécialiste FIFA en Médecine du Football, monsieur Jean-Jacques AKO pour nous éclairer sur le sujet.
Une pubalgie, qu’est-ce que c’est ?
Il est très difficile de donner une définition exacte de la pubalgie. La grande variété de blessures possibles au niveau de cette région anatomique en fait sa complexité. De nombreux mécanismes lésionnels et nombreuses structures anatomiques peuvent être mis en cause. D’expressions cliniques variées, la pubalgie se traduit comme un syndrome de surmenage induisant une douleur ressentie au niveau du carrefour inguino-pubien.

Le terme pubalgie est composé de deux mots : pubis et algie. L’ algie signifie la douleur, tandis que le pubis est une zone anatomique située dans le bas-ventre (l’hypogastre). La pubalgie est donc une douleur, très importante, du bas-ventre. La pubalgie est une douleur d’apparition progressive dont le siège est le bas-ventre, le pubis, voire les adducteurs.
Comment détecter une pubalgie ?
Il est souvent très simple de diagnostiquer une pubalgie du sportif, puisque le sportif vient consulter pour une douleur d’apparition progressive, rarement brutale, survenant après la pratique du sport dont le siège est le bas-ventre, le pubis, voire les adducteurs. Les irradiations de ces douleurs se font soit vers les muscles abdominaux, soit vers le périnée et les testicules. Aussi, ces douleurs peuvent être accentuées par la toux provoquée par les efforts de soulèvement ou par des mouvements brusques de flexion du tronc.
La douleur est le maître-mot de la pubalgie et provoque une impotence fonctionnelle totale, tant pour la pratique du football que dans beaucoup de mouvements de la vie professionnelle et vie personnelle. Le diagnostic de la pubalgie est validé par un bon examen clinique et les examens complémentaires (radiographie standard du bassin et/ou l’échographie dynamique, éventuellement l’IRM dans un second temps) qui à eux seuls ne sont pas suffisants.
Les pubalgies sont fréquentes chez les sportifs, en particulier dans les sports exigeant des coups de pieds, des changements soudains de directions, des torsions, des virages, des accélérations et décélérations rapides. Quels
sont alors les facteurs de risque des pubalgies ?
Le principal facteur de risque dépend du sport pratiqué et les sports les plus touchés sont : le football, le hockey sur glace, le rugby et le tennis. En résumé comme facteurs de risque, nous avons : la récidive dune pubalgie, l’âge, le manque de force musculaire au niveau des adducteurs et de la paroi abdominale (facteurs de risque intrinsèques) et l’intensité de l’effort lors des matchs et/ou entrainements, les gestes techniques spécifiques au sport pratiqué.
Existe-t-il un remède miracle pour la pubalgie ?
S’il en existait, je pense que tous les clubs de football s’arracheraient. Malheureusement, il n’existe pas de remède miracle pour soigner une pubalgie rapidement. Cependant, pour les footballeurs, un programme de prévention pourra être utile afin de limiter le risque de blessure.

Comment prévenir la pubalgie ?
Comme on le dit souvent, mieux vaut prévenir que guérir. Le kinésithérapeute prodiguera à son patient des conseils personnalisés pour empêcher la récidive de la pubalgie. Il l’aide à comprendre les causes de la pathologie puis à adopter de meilleures habitudes afin d’éviter les micro traumatismes, notamment grâce à des étirements adéquats et à des exercices de gainage. La prévention de la pubalgie passera aussi et surtout par un renforcement des muscles grands droits, obliques et pelviens, une hydratation appropriée ; puis au niveau footballistique : une bonne exécution de la conduite de balle, de la passe, de la technique de frappe, etc.
Nous conseillons donc dévaluer
systématiquement en pré-saison les points faibles concernant la force, la souplesse, la coordination avec établissement dun « profil joueur ». Ces sportifs ainsi que ceux possédant un antécédent de pubalgie bénéficient d’un travail individuel sur mesure en pré et mi-saison (détente des zones enraidies, renforcement des secteurs faibles, travail de coordination, tout ceci avec un préparateur physique diplômé et qualifié.
Quels sont les traitements de la pubalgie ?
Deux types d’approches sont possibles : le traitement conservateur ou le traitement chirurgical. Dans tous les cas, le rôle du kinésithérapeute est prépondérant. Une prise en charge kinésithérapique est nécessaire afin de diminuer, voire abolir les douleurs et ainsi augmenter l’efficience sportive.
En quoi consiste la rééducation ou la kinésithérapie ?
L’objectif de la kinésithérapie face à une pubalgie, c’est de rééquilibrer les tensions sur le pubis afin d’éliminer l’inflammation provoquant la douleur de pubalgie.
Pendant la phase douloureuse, la prise en charge par le kiné, quelques semaines sans faire de sport (repos complet : le repos sportif est la clef dun traitement efficace de la pubalgie), période pendant laquelle la glace (cryothérapie) et les anti-inflammatoires sont les premiers soins conseillés. Le kinésithérapeute fera des mobilisations articulaires dans le but de gagner en amplitude. L’apprentissage des étirements est une étape importante dans la prise en charge de la pubalgie. Il sagit détirer les adducteurs, le psoas, les ischio-jambiers et les fessiers. La pratique du vélo est autorisée, car elle permet la décharge et limite donc les contraintes sur le pubis.

Une fois la douleur des adducteurs atténuée, la seconde phase de la prise en charge se basera sur le travail de renforcement musculaire. Ce renforcement va se concentrer sur les muscles tels que les abdominaux, les obliques et le transverse, les adducteurs. Mais il ne faut pas non plus exclure les autres muscles dont ceux du dos et des membres pelviens qui sont importants également dans ce traitement de la pubalgie.
Il faut également noter que la discipline et la rigueur seront nécessaires dans le traitement de la pubalgie. Cette rééducation nécessite un travail personnel quotidien. Ce nest que par un travail rigoureux que le traitement évoluera de manière normale.
Quand faudrait-il faire recours à la chirurgie ?
En cas de douleur persistante au niveau du pubis et passé une durée de 3 mois sans évolution, on peut penser à l’intervention chirurgicale. L’intervention consiste en fonction du type de pubalgie soit en une ténotomie pour la pubalgie des adducteurs, ou en une réparation par suture pour la pubalgie pariéto-abdominale.

Comment se fera la reprise du sport après pubalgie ?
La reprise du sport se fait après consultation du médecin et du kinésithérapeute. Labsence de douleurs sur les tests permet la reprise avec une étape de réathlétisation, soit avec le kiné ou soit avec un préparateur physique qualifié. La reprise de la compétition se fera aux alentours de 6 à 8 semaines après la chirurgie de la pubalgie.
Votre mot de fin pour cet échange !
La pubalgie est une blessure classique pour un footballeur. Elle peut se soigner le plus simplement possible grâce à une prise en charge précise et adaptée mais pas seulement en avalant à longueur de journée, des anti-inflammatoires et antalgiques. En cas de douleur chronique, la chirurgie des adducteurs par ténotomie est possible et donne de bons résultats. La reprise se fait ensuite entre 6 à 8 semaines en compétition.