Des quintes de toux grippent depuis quelques heures la machine du football béninois. Les arbitres ont signé une pétition le mardi 27 décembre 2022 et comptent boycotter le championnat national de football.
« Trop c’est trop ! » Le mercure est monté dans les rangs des arbitres béninois. Ils ne décolèrent pas après l’incident survenu dimanche 25 décembre à Bembèrèkè.
Au terme du match Béké FC vs As Cavalier, (10eme journée du championnat national de football, score final 2-2) les arbitres ont été pris à partie par des supporters sulfureux. Insultés, Molestés, blessés, ces hommes du sifflet ont broyé du noir un dimanche de nativité où l’ambiance devrait être à la fête. Il est reproché à Wadoud Dossou Alokpo et ses assistants (Jonas Djossou, Rodrigue Anato et Michel Kicoukperi), une faute non sifflée sur le défenseur de Beke FC, lors du but égalisateur de Cavaliers.
Conséquence de cette déferlante martiale à coups de poings, de cailloux, et projectiles de tous genres, les arbitres s’en sortent avec des séquelles physiques : visages boursouflés, fronts blessés, doigts brisés, abdomen torturé.
Un énième cas de violences dans les stades qui a mis le feu aux poudres. Les maîtres du terrain réclament justice et sanctions. A travers un communiqué et ensuite une pétition signée de près d’une centaine d’arbitres (le chiffre exact ne saurait être évoqué, puisqu’il est en constante évolution) ils revendiquent leurs droits. Eux, qui affirment n’avoir rien perçu de leurs émoluments depuis le démarrage du championnat, qui en est à présent à sa onzième journée. « Nous nous déplaçons partout sur le territoire et nous hébergeons à nos frais. », déplore un arbitre qui a requis l’anonymat.
Médiation
Dans ce qui s’apparente pour les arbitres à une traversée du désert, à peine ont-ils haussé le ton que leurs voix semblent avoir trouvé écho favorable aux oreilles du président de la commission des arbitres, Francis Koto Gbian. Au moyen d’une note, il a invité les arbitres au calme et à la retenue, arguant que les dispositions sont en train d’être prises pour trouver une issue favorable.
Francis Koto Gbian a par ailleurs convoqué une réunion zoom en urgence avec les protestataires afin de trouver un accord pour éviter une paralysie de la onzième journée du championnat national.
Mais une nouvelle intervention vient changer la donne. «Au cours de la réunion virtuelle, M. Gbian a demandé qu’on l’excuse, qu’il doit recevoir un coup de fil. A son retour, il nous fait savoir qu’il était au téléphone avec le président de la FBF Mathurin de Chacus », raconte un arbitre. C’est l’appel qui va envenimer la situation.
Durcissement
Selon les informations recueillies auprès de nos différentes sources, le president de la Fédération beninoise de football Mathurin de Chacus aurait menacé les arbitres. «Avec ou sans eux, on va faire le championnat», aurait il prévenu. La couleuvre a du mal à passer. A présent, les arbitres n’entendent plus démordre et comptent aller au bout de leur action.
Ils trouvent malséant l’intervention du patron du football béninois qui aurait même déjà réquisitionné les arbitres FIFA pour siffler les matches programmés pour ce mercredi 28 décembre.
C’est l’imbroglio et l’incertitude totale au sein des clubs qui ne savent si les matches programmés auront lieu. Au sein de l’opinion, la posture de Mathurin de Chacus est totalement désapprouvée. « Pour un président de fédération, face à ce genre de situation, c’est abusé d’offrir une réponse pareille. Les arbitres ne cherchaient qu’à être compris et rassurés. Et comme à son habitude, il est encore passé à côté de l’essentiel », analyse un passionné de football rencontré au stade de l’amitié Général Mathieu Kerekou.
Réformes
Le 1er juillet 2022, à l’occasion d’une rencontre au palais des congrès de Cotonou, le ministre des sports a pourtant annoncé une réforme majeure au sein de l’arbitrage béninois pour tendre vers la professionnalisation du secteur.
Il s’agit du paiement d’un salaire mensuel aux arbitres. La nouvelle avait alors été bien accueillie. Six mois après, la réforme a toujours du plomb dans l’aile et les problèmes qui minent le monde de l’arbitrage au Benin restent les mêmes. A présent que les arbitres sont mécontents, c’est peut-être le début de la révolution.
Robert Kékély